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Communauté de communes Serre-Ponçon

Projet Lab 3I

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Contexte du projet

La problématique de l’accueil des publics en situation d’illettrisme ou non maîtrise de la langue française car allophones est prégnante dans les points d’accueil de publics (Espaces France Services, Maison de services au public notamment). Le non recours au droit dont peuvent être victimes ces publics est aujourd’hui renforcé par une dématérialisation systématique de l’accès aux services notamment administratifs et sociaux. Les problématiques d’illectronisme (illettrisme numérique, c’est à dire la difficulté à utiliser Internet dans la vie de tous les jours) croisent celles d’illettrisme et d’allophonisme qui provoquent des situations d’exclusion encore plus fortes.
Les réponses existantes aujourd’hui passent par des solutions montées ponctuellement via de l’orientation vers des ateliers Français Langue Etrangère, l’accompagnement aux démarches - avec des difficultés pour aller vers l’autonomisation de ces publics - et dans certains cas des partenariats pour travailler avec des structures pouvant gérer le multilinguisme ou la traduction.
Par ailleurs, ces services nécessitent d’être déployés au plus proche des publics concernés pour les accueillir au mieux. L’itinérance et la mutualisation avec d’autres services afin de développer un maillage territorial plus fin est un enjeu fondamental.
« Les illettrés du 21ème siècle ne seront pas ceux qui ne savent pas lire et écrire, mais ceux qui ne savent pas apprendre, désapprendre, et réapprendre ​ » ​ (Alvin Toffler 1971). L’illectronisme est un néologisme transposant le concept d’illettrisme dans le domaine de l’information
électronique et des nouvelles technologies. Pour autant ce sont deux réalités à distinguer, un public illettré n’étant pas forcément en situation d’illectronisme et inversement.
Selon l’INSEE, en 2013, 2,5 millions d’individus seraient illettrés représentant 7% de la population des 18-65 ans tandis que ce serait 10 millions de personnes, soit 15% de la population, qui seraient touchés par l’illectronisme (Ministère de la Recherche et de l’Economie numérique, 2013). Quant à la non-maîtrise des technologies de l’information et de la communication, elle englobe un public plus large.
Des personnes sachant lire et écrire peuvent être tout à fait démunies face aux outils technologiques, notamment parmi les personnes âgées. Autre différence notable, quant l’alphabet reste immuable, les supports numériques sont multiples et répondent chacun à leur propre logique (souris, touchpad, clavier à touches, écran tactile etc.) et à chaque mise à jour d’un site ou d’un logiciel, l’usager doit réapprendre à se familiariser avec la nouvelle interface. A noter que ces changements surviennent trop souvent sans le consentement de l’usager qui se voit imposer une nouvelle version.
D’un autre côté, un public illettré peut parfois mieux maîtriser les interfaces numérique en profitant de l’utilisation de pictogrammes, de synthèses vocales, etc. Les outils numériques étant de plus en plus adaptés et intuitifs, les supports se démocratisent et deviennent de plus en plus accessibles (Madeline Burgain, 2013). La vidéo et l’audio sont de plus en plus présents dans le numérique pour s’adresser à un maximum d’individus.
Cependant, selon l’ANLCI, “​ Il ne faut pas séparer la question numérique de celle du lire et écrire (Bruno Devauchelle, 2016). Les supports numériques reposant majoritairement sur de l’écrit, l’illettrisme reste un obstacle supplémentaire dans l’apprentissage du numérique. Lutter contre l’illectronisme c’est aussi s’engager pour que chacun maîtrise pleinement la lecture et l’écriture. Le numérique peut en effet être un puissant catalyseur pour lutter contre l’illettrisme en tant que levier pour la formation des adultes, clé pour le raccrochage des jeunes en difficulté avec la lecture, en somme un facilitateur des apprentissages qui créera de la motivation plutôt que de la frustration. ​ ”
Concernant l’allophonisme, on parle d’une catégorie spécifique, de personnes qui, à l’origine, parlent une autre langue que celle du pays d’accueil. Ce terme permet de distinguer des actions spécifiques, ne relevant pas nécessairement d’une absence de scolarisation initiale.
Ressources : ​ Elèves allophones, définition et ressources
En janvier 2014, Claudy Lebreton, président de l’Assemblée des Départements de France, a confié à Rémi Chaintron, président du Conseil général de Saône-et-Loire, une mission sur « L’innovation dans les politiques départementales ». Dans son rapport l'élu met notamment en avant l'itinérance des services comme faisant partie des grandes familles de l'innovation. « ​ L’itinérance peut être une réponse comme le prouvent les expériences menées par les Départements de l’Oise, de l’Essonne, des Alpes-Maritimes, de la Nièvre ou de l’Hérault. Les services du Département, les ludothèques ou halte-garderies mobiles, les bibliobus, les banques ambulantes, le camion médical itinérant ne sont que quelques exemples de l’étendue du champ d’application de ce type de solutions. »
La plupart des grands services publics réduisent de fait leur présence territoriale pour des raisons de rationalisation gestionnaire. Les services plus spécialisés ou plus locaux, marchands ou non marchands, n'ont pas les moyens économiques et humains d'assurer une couverture territoriale complète. En effet, la création de services dans ces territoires se heurte à la viabilité économique du service de proximité du fait de la faible densité démographique et des ressources financières réduites des collectivités locales. Face à ces difficultés maintenant bien connues, de nombreuses expériences d'itinérance se développent pour couvrir les besoins des territoires peu denses et enclavés. Elles concernent aujourd'hui de très nombreux secteurs d'activité. Tous les services itinérants ne se ressemblent pas et une approche plus fine s'impose pour en voir les limites, les avantages et les conditions de viabilité.
Une première typologie peut ainsi être faite (ADRETS, 2016) :
  • Services mobiles : Historiquement, les services itinérants en milieu rural sont marqués par l'image de la camionnette qui apporte ses produits (pain, viande, épicerie,..) sur la place du village en klaxonnant. Ces services ont, comme tous les petits commerces, subit la concurrence des grandes surfaces. Certains se maintiennent pour desservir les publics non mobiles et dépendants, et certains innovent pour faire face à la situation concurrentielle nouvelle : commande en ligne, livraison à domicile, multi-services, ...
  • Services itinérants : Au-delà du véhicule emblématique, d'autres services ont également besoin de lieux d'accueil pour accueillir leur activité : ainsi les services petite enfance, de médiation numérique, les ludothèques, les structures d'animation (jeunes, parents-enfants) ont pour spécificité d'acheminer du matériel qu'ils installent dans des locaux non outillés. Ces services permettent ainsi de mutualiser du matériel et des compétences entre plusieurs lieux. Par ailleurs les lieux d'accueil sont également souvent mutualisés pour accueillir plusieurs activités et rentabiliser la mise aux normes.
  • Compétences itinérantes dans des lieux non dédiés : Un troisième niveau de services itinérants peut être identifié, sans transport de gros matériel (pas besoin d'un mini-bus équipé) mais par le déplacement des personnes compétentes avec de la documentation (brochures, formulaires) : il peut s'agir de services sociaux, de services pour l'emploi, de prestations sociales, de Maisons de services au public. Ces services peuvent se faire ​ à domicile (travailleurs sociaux, etc.) ou être accueillis ​ dans un local de proximité telles qu'une mairie, une association, une banque, une salle municipale, ...
  • Compétences itinérantes dans des lieux dédiés : Le développement des services numériques pour les professionnels comme pour les usagers nécessite de bénéficier de lieux d'accueil mutualisés équipés en connexion haut débit, voir en matériel mis à disposition du public. Ces lieux peuvent accueillir des professionnels itinérants mais aussi des visio guichets (cf. l'expérience du dispositif Visio-RDV des Hautes-Alpes). La mutualisation de locaux d'accueil équipés pour les services itinérants permet de rendre une offre de services plus lisible pour le public et une mutualisation des coûts plus économiques pour chacun des partenaires. C'est notamment l'un des objectifs du label « Maison de services au public ».
Que ce soit la création de lieux ressources autour de pôles numériques rassemblant centre social, MSAP, Tiers-lieu, médiathèque, etc., ou de miser sur l’itinérance des dispositifs, les deux approches sont nécessaires et doivent cohabiter selon la réalité des territoires et des publics.
En 2013, le Conseil National du Numérique a souligné l’importance de poursuivre une politique ciblée de soutien à l’accès et à l’accompagnement des usages du numérique par une approche ascendante, en partant de l’expertise des acteurs locaux : “chaque situation est spécifique et des actions trop générales (par exemple l'octroi systématique d'une machine à toute une catégorie de population...) risquent à la fois de coûter cher et de ne pas atteindre leurs destinataires. Il semble préférable d'appuyer des initiatives portées par des acteurs au contact étroit des publics en difficulté ou encore, d'accompagner des démarches volontaires des bénéficiaires, comme le font certaines associations [...]”
Dans l’étude sur l’illectronisme réalisée par la DRJSCS des Hauts de France en 2018, celle-ci pointe les expérimentations de nomadisme face à la problématique de mobilité dans la ruralité : “Lors de l’investigation, nous avons été surpris par le nombre de dispositifs itinérants tels que la MSAP Sambre-et-Oise parcourant la Thiérache, le minibus labellisé CAF du Centre Socioculturel Les Portes du Valois ou encore le minibus MSAP/PIMMS Bruay-la-Buissière. [...] Ils se retrouvent essentiellement dans les poches de ruralité et de pauvreté qui sont des zones grises en ressources. [...] La Région imagine, sur la base des Tiers-Lieux, un système dans lequel un animateur se déplace
hebdomadairement dans les communes pour assurer des cours.”

Objectifs du projet

L’objectif général du projet est d’améliorer l’accompagnement des publics en situation d’illettrisme, allophonisme et illectronisme dans leurs démarches d’accès aux services afin de limiter le non recours au droit de ces populations “invisibles”. Cela pourra passer par différentes modalités de mise en oeuvre permettant de trouver les meilleurs process et/ou dispositifs de mise en proximité des services, notamment l’itinérance. Pour se faire le projet se décline en 3 axes :
  • Axe 1 : expérimentations locales de mise en oeuvre d’ateliers afin de tester, approfondir des modalités pédagogiques, ludiques allant du repérage des difficultés des usagers à l’évaluation des techniques utilisées en passant par l’approfondissement via la création de supports et process réutilisables par d’autres.
  • Axe 2 ​ : partage de savoirs et de savoir-faire afin de valoriser les compétences des partenaires du projet et de les compléter avec des ressources extérieures.
  • Axe 3 : coopération territoriale au sein du laboratoire expérimental afin d’analyser plus finement les profils et besoins des territoires, de stimuler une communauté et des partenariats locaux autour des publics les plus en difficulté et en retirer une évaluation et une analyse partagée permettant un ensemble de préconisations